(VIDEO) : Argent et haut niveau: «Si les gens s’imaginent qu’être sportif de haut niveau te met à l'abri...»

Il y a ceux dont tout le monde parle, squatteurs du classement des 50 sportifs français les mieux payés, multimillionnaires stars. Il y a ceux dont personne ne parle, qui galèrent pour joindre les deux bouts et vivre de leur passion. Et puis il y a ceux qui se situent «au milieu». Le boxeur Khedafi Djelkhir, médaillé d’argent aux Jeux de Pékin, passé pro sans succès en 2009 puis éphémèrement retraité trois ans plus tard, fait partie de ceux-là. Tout juste champion du monde APB des -56kg et qualifié pour les Jeux de Rio, il nous explique comment vit à 31 ans un athlète de haut niveau «normal» en France.

Ses revenus: «Je gagne un peu plus que le salaire moyen»
«J’ai rejoint l’APB (une nouvelle structure qui crée un système de classement mondial entre les boxeurs pro et leur permet d’accéder au tournoi olympique) et je suis payé au combat. Il y a un calendrier respecté (il a participé à quatre combats cette année pour l’APB, et devra désormais défendre sa ceinture), ce qui permet d’avoir une certaine sérénité que je n’avais pas quand je dépendais des promoteurs pour avoir des combats. C'était la galère, la débrouille, il n'y avait pas de plan de carrière. C'est pour ça que j'ai arrêté en 2012. Aujourd'hui, je gagne un peu plus qu’un Français moyen (ndr: le salaire moyen est d’environ 2.100 euros par mois), et heureusement, quand on voit l’implication qu’être sportif de haut niveau demande. Quand on est une personne plus ou moins publique, on espère un peu plus. Notre carrière dure au maximum quinze ans. Je suis bien loin des footballeurs, mais je peux préparer l’avenir avec ce que je gagne.»

Ses aides: «On n’est pas livrés à nous-mêmes»
«Comme la compétition est reconnue par le CIO, je suis relié à la Fédération française de boxe et je figure parmi les sportifs sur liste ministérielle. Ce n’est pas négligeable: ça me donne le droit de m’entraîner avec l’équipe de France à l’Insep, d’avoir une structure. On n’est pas livrés à nous-mêmes. Grâce à ce statut, je peux obtenir des aides de ma ville, un contrat image du Conseil général, pour pallier certain frais, que ce soit le loyer, les équipements ou les transports (il vit à Besançon mais s’entraîne à Paris). Ces aides peuvent aller de 500 euros à un salaire, et en échange j’effectue des interventions dans des collèges ou à certains événements. Je n’ai pas de sponsor personnel mais j’espère trouver grâce à la ceinture. Le problème, c’est que les sportifs comme moi n’ont pas le temps d’engager des démarches en amont pour faire fructifier leurs résultats, ni les moyens d’engager un agent pour le faire. J’ai fait le choix de ne pas m’en occuper, de ne me concentrer que sur le sportif, et donc de perdre de l’argent. On ne peut pas être sur tous les fronts.»
L’avenir: «Je sais déjà que je travaillerai après ma retraite sportive»
«Je peux mettre de l’argent de côté chaque mois, mais je fais très attention, je ne suis pas dépensier. Je pense à mon avenir à et celui de ma famille (ndr: il est marié et père d’une fille). Pour pouvoir vivre tranquillement, je sais déjà que je devrai travailler après ma carrière sportive. Je suis actuellement éducateur sportif en congés sans solde à la ville de Besançon. Je verrai avec eux ce que je pourrais faire quand je reviendrai, c’est assez ouvert, pourquoi pas dans le social? Aujourd’hui, la boxe te permet de bien vivre le moment présent. Mais si les gens s’imaginent que le fait d’être sportif de haut niveau te met à l’abri de tout, c’est faux. Je suis un boxeur qui peut s’épanouir dans ce qu’il fait et espérer construire quelque chose de correct, mais il est évident que si le seul moteur est l’aspect financier, ce n’est pas la peine de faire de la boxe.»

SOURCE: http://www.20minutes.fr